Découvrez l’article du magazine Bon Goût et notre interview pour présenter le Domaine de La Presle et nos millésimes.
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Le Domaine de La Presle est un écosystème complet constitué de bois en partie supérieure avec de nombreuses espèces animales, de prés avec des ruches et de vignes. Un écosystème entretenu qui a permis au domaine d’obtenir le label Haute Valeur Environnementale Niveau 3. Propriété de la même famille depuis 1719, le domaine a été repris en 2021 par France et Charles-Henri d’Hotelans, dixième génération et les premiers à l’exploiter en direct.
BG : France, vous vous occupez directement de l’exploitation et vous venez de réaliser votre troisième récolte. Pouvez-vous nous en parler ?
FRANCE D’HOTELANS : Je vous emmène dans le cuvage, là où commencent les vinifications une fois que la vendange est terminée. Tout est récolté à la main puisque notre vignoble est en coteaux. C’est une des garanties de la qualité de nos vins : une fois ramassées à la main par les cueilleurs et mises dans des hottes, les grappes sont versées sur une table de tri afin que seule une vendange saine entre dans les cuves. La fermentation et la macération, qui durent entre 10 et 12 jours, permettent d’extraire le maximum de nos raisins. Après cette étape, le raisin est pressuré pour en retirer le jus, qui est ensuite placé dans nos cuves d’élevage. Le vin patientera dans cette cave tricentenaire pendant au moins 10 mois avant d’être mis en bouteilles au mois de juin. Nous produisons des vins de caractère qui peuvent s’apprécier dans la jeunesse mais méritent souvent un vieillissement de 4 à 5 ans.
BG : Combien de bouteilles produisez-vous ? Et quel est votre marché ?
FH : Environ 50 000 bouteilles par an. Nous avons repris en 2021, conduit notre première vendange en 2022 et vendu nos premières bouteilles en 2023. On a toujours fait du vin sur le domaine, mais il était vendu à un négociant qui le mettait sous son étiquette. En reprenant l’exploitation, nous avons voulu retrouver la maîtrise du travail de la vigne, de la vinification et de la distribution. Nous voulons une distribution maîtrisée et sélective, dans les réseaux de prescription : cavistes et restaurateurs, en région lyonnaise d’abord et plus largement à Paris et dans d’autres régions françaises via un réseau d’agents et de partenaires. Nous visons aussi l’export, pour travailler des volumes plus importants et bien valorisés.
BG : Comment avez-vous vécu la récolte de 2024 et quelles sont les perspectives pour vos vins cette année ?
FH : L’année 2024 a été plus compliquée que d’autres années avec 60% de précipitations en plus, de la grêle, du gel, etc. Nous avons beaucoup craint la maladie à cause des fortes pluies, mais avons finalement été plutôt épargnés. La vendange 2024 promet des vins très intéressants. Ils sont un peu plus souples et légers, moins riches en alcool. C’est intéressant pour répondre aux attentes des consommateurs actuels, qui recherchent des vins plus vifs, plus digestes. En outre, cette année, nous avons intégré une nouvelle Appellation : le Moulin-à-Vent. Nous avons acquis une parcelle d’un hectare et demi qui rejoint le Domaine de La Presle. Nous produirons 8 000 bouteilles sous cette Appellation.
BG : Vous parliez des attentes des consommateurs actuels. Quelles sont les grandes tendances en matière de consommation, et comment vos vins s’y inscrivent-ils ?
CHARLES-HENRI : Le consommateur veut redécouvrir les vins de terroir. D’ailleurs quand on parle de Fleurie et Moulin-à-Vent, beaucoup de consommateurs les associent à la Bourgogne, ce qui montre que les Appellations communales, les terroirs ont plus d’impact que la grande région dans laquelle on est. Nous produisons des vins de terroir de nos Appellations, comme du vin de La Presle à Fleurie.
Nos vins sont dans la tendance, ils sont digestes avec une structure tannique relativement légère, peu alcooleux. Des vins qu’on peut travailler soit comme des vins légers, qui se boivent presque comme des vins blancs, soit comme des vins de terroir avec plus d’extraction, plus d’élevage, qui soutiennent très bien des viandes en sauce par exemple
BG : Quelle est votre approche par rapport à la viticulture biologique ?
CHH : Nous ne voulons pas nous enfermer dans les frontières d’un label. Pour autant, nous adoptons des pratiques respectueuses à la fois pour la plante et le sol. Nous entretenons un écosystème qui a permis au domaine d’obtenir le label Haute Valeur Environnementale Niveau 3.
BG : France, qu’est-ce qui vous a motivé à quitter votre vie parisienne et la direction des ressources humaines de grands groupes et, avec votre mari, rejoindre et exploiter cette propriété, dans sa famille depuis trois siècles ?
FH : Nous avons voulu reprendre la main sur l’exploitation de ce terroir pour révéler la beauté et le caractère du lieu. Il nous semblait important que notre famille vienne renouer avec le travail de la terre et de la vigne ; mettre en lumière la qualité du terroir en mettant nous-mêmes les mains dans la terre.
C’est aussi la volonté de transmettre à nos enfants le patrimoine immatériel qui est lié à cet endroit et au vignoble : l’éveil des cinq sens, le goût du travail, le sens de l’effort, le sentiment d’appartenance.
BG : Charles-Henri, vous avez un pied dans un domaine viticole et l’autre dans la banque d’affaires chez Rothschild, notamment spécialisé dans les transactions vini-viticoles. Quel est votre parcours ?
CHH : En 2009, après HEC et en pleine crise internationale de la finance, au lieu de chercher un emploi, j’ai décidé de me lancer dans un bac pro vini-viticole. Passionné de vin, ayant participé à de nombreux concours de dégustation, je souhaitais en savoir plus. En septembre 2009, je me suis retrouvé en stage chez Louis Jadot, au Château des Jacques à Romanèche-Thorins, où j’ai réalisé pendant plusieurs mois l’ensemble des travaux de viticulture et de vinification. Au-delà d’une formation, ce fut une révélation, au point que j’ai voulu dans ma recherche de travail allier les connaissances financières et stratégiques apprises en école de commerce avec cette matière viticole. En intégrant une banque d’affaires, j’ai eu à coeur de travailler sur des opérations de fusion-acquisition en lien avec le monde des vins, des spiritueux et des actifs liés à la terre.
BG : Arrivez-vous à concilier votre métier d’exploitant avec celui de banquier d’affaires ?
CHH : Chaque métier est un temps plein, c’est pourquoi nous avons décidé avec France que ce serait elle qui gérerait l’exploitation. Je l’accompagne autant que je peux, essentiellement le week-end. J’ouvre aussi mon carnet d’adresses dans le monde des vins et spiritueux pour que notre vin trouve sa place sur les bonnes tables et dans les bons réseaux. Et surtout nous partageons tout ça en famille, car ce domaine est avant tout notre projet familial, dans lequel on embarque aussi nos enfants. Il est essentiel de leur donner cette éducation, comme France l’évoquait tout à l’heure, en leur expliquant que le travail de l’homme permet de magnifier la nature qui nous donnera en retour de bons produits que nous aurons plaisir à partager autour d’une table.
BG : Votre expertise dans les transactions vini-viticoles au sein de Rothschild influence-t-elle la gestion de votre propre domaine ?
CHH : Je croise beaucoup de grands vignerons ou de grandes familles qui ont de très belles propriétés viticoles, sur des terroirs extrêmement prestigieux et j’en tire beaucoup d’enseignements.
D’abord la vigne se joue dans le temps long et les investissements trouvent leur rentabilité sur le long terme. Quand on plante une vigne c’est pour 60 ans, quand on fait un cuvage c’est pour 50 ans, quand on achète un tracteur c’est pour 20 ans. Tout cela impose de faire les bons choix. Ensuite, tous les clients que j’accompagne sont dans un rapport très humble vis-à-vis de la nature. Notre mission en tant que gestionnaire d’un domaine viticole, c’est d’accompagner la nature et de transformer le produit du mieux possible.
BG : Qu’est-ce qui motive les investisseurs à acquérir un domaine viticole ?
CHH : Je pense que la réponse est très personnelle. Pour autant, derrière chaque investisseur se trouve souvent une réussite professionnelle qui a pu se vivre dans des univers très aseptisés, justifiant une volonté de se reconnecter au temps de la nature et à la terre. Volonté de se retrouver dans quelque chose d’authentique. Volonté d’avoir un impact sur son environnement et de participer à la transformation d’un produit qui a vocation à être partagé et à rassembler. Enfin, derrière l’exploitation, la vigne est une réserve de valeur, c’est un investissement patrimonial, qui peut offrir un potentiel de gain en capital à moyen terme.
BG : Quelle est votre vision pour l’avenir du Beaujolais et comment traduisez-vous l’évolution des investissements dans cette région ?
CHH : Là encore il faut se remettre dans le temps long. Au début du XXème siècle un tonneau de Moulin-à-Vent se vendait au même prix qu’un Premier Cru de Vosne-Romanée. Les crus du Beaujolais étaient sur toutes les belles tables. Dans les années 1970, les crus du Beaujolais ont cédé la place à cette énorme machine marketing du Beaujolais Nouveau qui a fait connaître le Beaujolais dans le monde entier. Sa notoriété spontanée est maintenant incroyable. Revers de la médaille, nos exploitations ont moins investi, moins travaillé le vignoble pour le convertir aux enjeux du XXIème siècle. Néanmoins, avec le repli du Beaujolais Nouveau, on redécouvre ce vignoble de terroir, ses crus. Comme les terroirs sont encore accessibles, beaucoup de nouveaux vignerons de talents s’y installent. Ils ont fait leurs classes dans les grands vignobles de Bourgogne qui sont devenus inabordables. Un hectare de Pommard peut se vendre à 1 million d’euros, un hectare de Bâtard-Montrachet peut atteindre 50 millions d’euros, quand un bel hectare de crus du Beaujolais se situe entre 150 et 200 000 euros.
BG : Les crus du Beaujolais reprennent-ils la cote ?
CHH : Les grands crus de Bourgogne ou de Bordeaux sont devenus des marques et ont rejoint l’univers du luxe. Ils ont perdu une bonne partie des consommateurs français qui veulent accompagner leur repas d’un bon vin sans que ce soit ostentatoire. Ici on fait des bons vins, faits pour être bus en partageant des bons moments, et qui restent accessibles.
BG : Comment voyez-vous l’avenir du Domaine ?
CHH : Être un des Piliers de l’Appellation, être reconnu comme un vin de qualité et présent sur des belles tables en France et à l’international. Et puis élargir notre gamme, en rouge mais aussi en blanc. Pourquoi pas acheter des vignes en blanc pour avoir un Beaujolais qui rivalise avec un Pouilly-Fuissé ou un Saint-Véran. Et continuer le travail de valorisation de notre patrimoine matériel et immatériel.
BG : Le travail de la vigne est un véritable engagement, et voir les premiers fruits de votre travail doit être une grande satisfaction pour vous. Y a-t-il un accomplissement dont vous êtes fier et que vous aimeriez partager ?
FH : La cuvée Racines 2022 a été choisie par 30 vignerons du Cru Fleurie lors d’une dégustation à l’aveugle, pour représenter l’Appellation lors d’événements. Une belle reconnaissance de nos pairs.
BG : C’est un très joli nom pour votre première cuvée, Racines – sortie en 2022. Pourquoi l’avoir ainsi nommée ?
CHH : Ce nom reflète notre enracinement à La Presle. Il s’agit d’une sélection des meilleures parcelles vinifiées dans nos caves de La Presle. Ce qui est en cuve actuellement – le fruit de la récolte 2024 – nous permettra de développer quatre autres cuvées et de toucher un public plus large
BG : Les traits distinctifs des vins de votre domaine ?
FH : Du caractère, de l’élégance et de la finesse, une certaine intensité.
BG : Quel est l’accord met et vin idéal avec votre cuvée Racines ?
CHH : Un bon poulet à la crème aux morilles de la Maison Abel à Lyon !